En quoi l’Aïkido aide-t-il à se construire ?
J’ai débuté l’étude de l’Aïkido grâce à deux impressions fortes :
- l’efficacité qui me semblait évidente,
- l’importance des rituels entourant la pratique.
C’est progressivement, par la recherche du geste le plus précis et le plus juste possible que j’ai réalisé que l’efficacité, le fruit des recherches, ne comptait que par le chemin qui doit y mener. Ce chemin est suivi grâce à un gros travail sur soi, travail physique tout d’abord de renforcement musculaire et articulaire, travail lié à la respiration.
La maîtrise de soi, de ses émotions, ses peurs et ses frustrations se construisent en parallèle.
L’Aïkido est donc une discipline qui vise à pétrir le corps et, pratiquée dans un dojo (lieu où on étudie la voie), c’est aussi un exercice spirituel permettant le développement de la personnalité. Quelque soit le lieu où sont posés les tatamis, ce sont les rituels qui engagent dans la pratique et qui transforment ce lieu en lieu « sacré ».
Des deux impressions fortes qui m’ont engagé dans la pratique, c’est un chemin vers l’autonomie que j’ai le sentiment de parcourir et n’est-ce pas l’objectif de toute éducation ?
En accomplissant des « gestes guerriers » où concentration, contrôle de soi sont nécessaires, dans un cadre constitué de rituels acceptés, en étant présent à tout ce qui se passe, l’Aïkido conduit à exprimer sa personnalité dans le rapport à autrui.
L’Aïkido aide aussi à se construire dans l’unité. Tout d’abord, l’unité du corps et de l’esprit par l’exercice et les rituels associés, par le mouvement et la respiration associés, cette unité créant une énergie circulant librement dans le corps du pratiquant.
Dans le même temps, l’Aïkido aide à se construire avec l’autre, les autres par la gestion d’un conflit créateur. Pour construire avec l’autre, il faut le respecter, accepter ses différences, s’exercer à la tolérance. Cette recherche de l’harmonie n’empêche pas la droiture dans le conflit et accepter l’autre n’empêche pas d’exprimer sa personnalité. On en revient au paradoxe des contraintes qui, acceptées, aident à se construire: contraintes martiales, rituels nécessaires, contraintes de confrontation et d’acceptation.
Il s’agit donc d’être sincère avec soi-même, avec l’autre, les autres car c’est avec lui, avec eux que se construit la technique dont l’objectif final, l’objectif de tout Budo est la paix (Budo : arrêter la lance).
Le terme « Shugyo » exprime ce paradoxe. Shugyo ne veut pas seulement dire exercice ou entraînement. Par la pratique physique se construit un lien concret entre le développement du corps et le développement de la personnalité. Maître Tamura, dans ses écrits précise ce terme et conclut : « Dans le dojo, l’homme qui s’adonne aux martiaux pratique une purification profonde, pour affirmer sa personnalité de guerrier, ses capacités, son esprit, son courage, sa force d’âme. »